Aptitudes et contre-indications à la plongée scaphandre

 

 

La plongée scaphandre devenant au fil des années une activité de plus en plus populaire, la nécessité d’avoir un encadrement médical spécifique à cette discipline s’est rapidement fait sentir. Effectivement, si l’on considère l’âge des pratiquants, l’on peut effectuer cette activité de l’enfance à l’âge adulte le plus avancé. Les pathologies pouvant influer sur la pratique de la plongée sous-marine sont comme l’on peut s’y attendre fort différente chez l’enfant et chez l’adulte vieillissant. Les pathologies de la sphère ORL sont de loin celles qui portent le plus à conséquence lors de la plongée chez les enfants. Chez les adultes âgés par contre, ce sont les pathologies cardiovasculaires dont la prévalence augmente considérablement qui sont majoritairement impliquées dans cette pratique sportive. L’incidence de pathologies endocriniennes, et du diabète en particulier, augmente considérablement avec l’âge également.

Aussi l’examen d’aptitude médicale à la plongée sous-marine devra être mené de façon fondamentalement différente chez un enfant souffrant potentiellement de pathologies ORL infracliniques mais pouvant avoir des conséquences sur une activité subaquatique ou chez un adulte d’âge avancé chez lequel il devient fort peu probable d’être atteint d’une pathologie ORL à traduction infraclinique mais qui sera bien plus à risque de développer des défaillances du système cardio-vasculaire ou endocrinien et l’on peut penser en particulier au diabète. Si généralement l’activité professionnelle hyperbare est fortement encadrée par des textes de loi quels que soient les pays considérés étant donné la législation du travail existante, le contrôle médical auquel est soumise la plongée loisir est, elle, par contre fortement variable d’un pays à l’autre. Force est de constater que chaque pays dispose de règles propres à ses fédérations de plongée loisir bien souvent et plus rarement encadrées par la loi.

Ainsi en Australie ou à Malte, l’examen médical d’aptitude à la plongée sous-marine ne peut être délivré que par un médecin spécialisé en médecine de plongée, quel que soit le niveau des candidats plongeurs. En Angleterre, un examen par un médecin spécialisé en médecine de plongée est obligatoire avant une quelconque formation en plongée sous-marine. En France, le rôle du médecin du sport a été mis en avant, tout comme en Hollande. En Amérique du Nord par contre, le rôle du médecin n’est que consultatif et l’autorisation est attribuée au décours du remplissage d’un formulaire médical de santé. En Belgique, selon les fédérations de plongeurs auxquelles on s’adresse, les règles peuvent être fort différentes. L’on peut dire qu’en général une formation spécifique en médecine subaquatique et hyperbare n’est que peu reconnue dans notre pays. Effectivement, certaines fédérations préfèrent mettre en avant le caractère « plongeur » du médecin pour l’associer à leur fédération et imposer un avis médical préalable d’un de ces médecins avant de pouvoir adhérer à un des clubs de cette fédération. D’autre fédérations par contre n’ont pas de préférences « médicales » et s’en réfèrent si nécessaire au seul avis du médecin traitant. Quoi qu’il en soit, il en est toujours de la responsabilité du médecin qui a attesté qu’un de ses patients était apte à une activité sportive de s’assurer que c’est bien le cas. Le fait de ne s’en référer si nécessaire qu’au médecin de famille n’est certainement pas dénué de bon sens. Même en l’absence de capacité de plongeur de ce médecin, connaissant le mieux ses patients il est le plus apte à savoir si une pathologie sous-jacente existant de longue date et aux présentations paucisymptomatiques peut être à l’origine d’une contre-indication à la plongée sous-marine. Aujourd’hui, les informations médicales quant aux contre-indications absolues ou relatives à pouvoir effectuer la plongée sous-marine sont aisément accessibles sur internet. Chaque fédération a effectivement en général en son sein une commission médicale qui établit la liste des contre-indications absolues ou relatives à cette activité sportive. Outre ces commissions médicales affiliées à des fédérations, certaines sociétés de médecine subaquatique et hyperbare émettent également les recommandations médicales qui doivent entourer cette activité.

 

De façon succincte, on peut classer les contre-indications définitives et temporaires à la plongée sous-marine dans les différentes disciplines comme suit :

 

Discipline Contre-indications temporaires Contre-indications définitives
Cardiologie Hypertension artérielle incontrôléeCardiopathie ischémique non investiguée

Péricardite

Traitement anti-arythmique selon le cas

Traitement par bêtabloquants selon le cas

Shunt droit-gauche découvert au décours d’un accident de décompression à symptomatologie neurologique ou cochléovestibulaire

Cardiopathie congénitale non traitéeInsuffisance cardiaque symptomatique

Cardiomyopathie obstructive

Trouble conductif de type BAV du 2e degré ou de grade supérieur non appareillé

Survenue de tachycardie paroxystique

Maladie valvulaire significative

Toute pathologie à risque syncopal

Oto-rhino-laryngologie Survenue de vertiges d’étiologie indéterminée Survenue récente d’une crise de vertigesTout état tubotympanique pouvant engendrer des vertiges alterno-bariques par manœuvre excessive d’équilibration

Polypes naso-sinusiens

Chirurgie otologique à déterminer

Infection significative

Perforation tympanique y inclus les aérateurs transtympaniques

Barotraumatismes de l’oreille interne

Accidents de décompression labyrinthique à évaluer

Asymétrie vestibulaire ³ 50 %

Ossiculoplastie de l’oreille moyenneTrachéostomie

Evidement pétromastoïdien

Cophose unilatérale

Otospongiose ayant fait l’objet d’un traitement chirurgical

Laryngocèle

Déficit audiométrique bilatéral selon sa gravité Destruction labyrinthique uni- ou bilatérale

Fracture du rocher

Fistule périlymphatique

Déficits vestibulaires non compensés

 

 

Pneumologie Traumatisme thoracique récentPneumothorax spontané récent

Pleurésie

Pathologie infectieuse pulmonaire

Insuffisance respiratoire chroniquePneumopathie de type asthmatiforme selon évaluation Hypertension artérielle pulmonaire

Pneumopathie fibrosante

Episodes de pneumothorax spontanés sur maladie bulleuse selon évaluation

Chirurgie pulmonaire selon évaluation

Ophtalmologie Traitement par bêtabloquants par voie locale d’un glaucome selon évaluationGreffe de cornée selon délai depuis traitement et évolution

Chirurgie vitro-rétinienne de moins de 2 mois

Chirurgie de type photo-kératectomie réfractive de moins de 1 mois

Toute affection aiguë du globe oculaire jusqu’à guérison

Toute prothèse oculaire ou implant creuxPour les niveaux de plongée avancés et les niveaux professionnels, une vision binoculaire avec correction restant affectée à un niveau inférieur à 5/10

Kératocône au-delà d’un stade 2

Toute pathologie vasculaire de la rétine, de la choroïde ou de la papille en voie de stabilisation et à risque de saignement

Dermatologie Selon importance des signes locaux et éventuelle répercussion pulmonaire, neurologique ou vasculaire Selon importance des signes locaux et éventuelle répercussion pulmonaire, neurologique ou vasculaire
Gastro-entérologie Hernie hiataleReflux gastro-œsophagien selon évaluation Manchon chirurgical anti-reflux
Neurologie Traumatismes crâniens graves récents Toute épilepsieTout syndrome déficitaire sévère

Pertes de connaissance itérative

Effraction méningée neurochirurgicale ORL ou traumatique

Incapacité motrice cérébrale

Causes métaboliques Tétanie, spasmophilieToute maladie métabolique ou endocrinienne selon évaluation Diabète insulino-requérant selon évaluationDiabète non insulino-requérant selon évaluation (traitement par Biguanide)

Toute maladie métabolique ou endocrinienne selon évaluation

Gynécologie Grossesse
Hématologie Phlébite d’origine indéterminée Thrombopénie périphérique et thrombopathie congénitalePhlébite à répétition et trouble de la crase sanguine

Hémophilie selon évaluation de la gravité

 

Par ailleurs, toute prise de médicaments ou de substances susceptibles de modifier le comportement des individus peut être une cause de contre-indication à la réalisation de la plongée scaphandre. En règle générale, l’évaluation des pathologies faisant l’objet d’un débat concernant une éventuelle contre-indication à la plongée sous-marine doit faire l’objet d’une attestation de la part d’un médecin spécialisé en médecine subaquatique et hyperbare et éventuellement d’un médecin de fédération selon les règles en vigueur au sein de la fédération.

 

Il en va de même pour les certificats d’autorisation à la reprise de la plongée après survenue d’un accident de décompression ou d’un barotraumatisme qui se basera généralement sur les règles suivantes :

1. Suite à une surpression pulmonaire avec signes pulmonaires exclusifs, une contre-indication de 1 mois minimum est indiquée et nécessitera par la suite une exploration par CT scanner thoracique avant d’autoriser une reprise en vue de s’assurer de l’absence d’effraction pulmonaire générant un pneumothorax ou un pneumomédiastin. Les surpressions pulmonaires occasionnant également des signes neurologiques font l’objet d’une contre-indication définitive à la pratique de la plongée sous-marine.

2. Pour ce qui est de la sphère ORL, un barotraumatisme sans perforation du tympan nécessite un repos de plongée de 5 jours à 2 semaines et une autorisation de reprise sera délivrée moyennant otoscopie et audiotympanométrie. La normalisation de ces deux tests est nécessaire pour autoriser une reprise de l’activité. Lorsqu’une perforation tympanique est observée, la contre-indication initiale durera la durée de la perforation tympanique. Une fois de plus une otoscopie et une audiotympanométrie seront nécessaires en vue d’autoriser une reprise de l’activité moyennant une cicatrisation spontanée ou une tympanoplastie et une restauration de l’acuité auditive « satisfaisante ». Dans tous les cas, l’incapacité temporaire sera d’au moins 2 mois.

3. Pour les cas de barotraumatimes de l’oreille interne, une incapacité de 4 à 6 mois sera donnée et une reprise autorisée moyennant audiovestibulométrie en vue de s’assurer d’une restauration de l’acuité dans les fréquences conversationnelles et l’absence d’acouphène intoléré.

4. Pour ce qui est des accidents de décompression cutanée, une contre-indication initiale de 8 jours sera déterminée.

5. Pour les accidents de décompression à localisation ostéo-articulaire, une contre-indication de 1 mois sera déterminée et une reprise autorisée moyennant réalisation d’une IRM et d’un CT scanner après 1 mois. La réalisation d’une scintigraphie reste aujourd’hui discutée. En cas de présence d’image d’ostéonécrose, une prolongation de la contre-indication sera effectuée pour une durée de 6 mois moyennant surveillance.

6. Pour les accidents de décompression labyrinthique une incapacité temporaire de 6 mois est attribuée et une reprise autorisée moyennant une audiovestibulométrie révélant une récupération clinique et une normalisation des tests. En cas de non normalisation, une réévaluation à 6 mois sera effectuée.

7. Pour les accidents de décompression médullaire, une incapacité temporaire de 6 mois est réalisée. Une évaluation neurologique après 6 mois sera réalisée en vue d’objectiver une persistance de troubles moteurs, sphinctériens ou sensitifs profonds et/ou superficiels. En cas de séquelles sensitives superficielles exclusives, une autorisation de reprise sera d’emblée délivrée. En cas d’autres troubles présents, une prolongation de 6 mois sera déterminée avant réévaluation.

8. Pour ce qui est des accidents de décompression cérébrale une incapacité de 6 mois sera attribuée et une reprise autorisée moyennant réalisation d’une résonance magnétique nucléaire et après recherche d’un shunt droit-gauche intracardiaque à l’aide d’une échographie transoesophagienne. En cas de séquelle neurologique ou radiologique ou persistance du shunt, la contre-indication risque de devenir définitive. En cas de régression, une autorisation de reprise sera délivrée.